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infortunés qui naîtraient après moi, qui seraient de même menacés du verdict infâme d’un médecin sans entrailles, il me semblait devoir exécuter le docteur Haller.

Ne croyez pas que j’accueillis cette idée sans résistance. Bien au contraire, j’accumulais les raisons pour excuser le docteur, je me répétais à satiété que moi-même avais supplié, exigé la fatale réponse. Rien n’y fit. Ma raison — oui, oui, ma raison, pas mon sentiment ! — me convainquit chaque jour davantage qu’il avait outrepassé ses droits, que rien ne justifiait, chez un homme investi de l’auguste fonction de combattre la maladie, un semblable abus de force.

Et une suggestion invincible me poussait de plus en plus à commettre mon acte.

Un matin, je me décidai, j’achetai un revolver. Je mis toutes mes affaires en ordre, car j’avais vaguement l’intention d’en finir aussi avec moi-même. Je me rendis cette fois, non plus à l’hôpital, mais chez le docteur lui-même, à sa consultation privée.

J’attendis assez longtemps, et je dois avouer que cette attente n’affaiblit pas une minute ma résolution.

Il n’en fut pas de même lorsque j’arrivai en