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paraissait préférable à la sombre incertitude où je végétais… Pour être plus sûr d’une réponse sincère, je me déterminai à aller dans un de nos grands hôpitaux, à la consultation du docteur Haller… Et ce n’est pas sans raison que je choisis Haller… Il jouissait d’une réputation de franchise confinant à la brutalité… franchise doublée d’une sûreté presque infaillible de diagnostic… Donc, un matin de novembre, j’arrivai à la célèbre consultation. Après une attente assez longue, je fus introduit… Je me souviendrai toute ma vie de cette minute fatale… je reverrai jusqu’à mon dernier soupir la grande salle… les élèves en groupe… la figure carrée d’Haller, ses gros yeux noirs et perçants qui se fixaient sur moi… Mon cœur battait horriblement… J’exposai avec fièvre l’objet de ma visite, le désir profond, le besoin intolérable que j’éprouvais d’avoir une idée exacte de mon mal… Il tenta plusieurs fois de m’interrompre, me faisant remarquer que d’autres malades attendaient dans l’antichambre. Mais je ne l’écoutais pas, je parlais avec volubilité, je le suppliais de me dire la vérité, toute la vérité, si cruelle pût-elle être… Je vis l’impatience grandir sur son visage, ses yeux briller d’une espèce de colère. Il finit par me crier violemment, impé-