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cri s’éleva dans une compagnie, cri que j’ai su depuis être : « Rambert ! » Ce fut comme une traînée de poudre ; le cri se répandit en moins d’une minute à travers les bataillons, si puissamment qu’une partie des autres troupes, entraînée, se mit à pousser des acclamations. Le pauvre vieux Dave regardait d’un air effaré, et comprenant que l’abnégation de toute vanité devenait un devoir suprême, il se résigna, il alla lui-même supplier Rambert de céder aux vœux du régiment. Et je vis Rambert s’avancer.

Un étrange sentiment de confiance traversa mon âme, tandis que le jeune homme parcourait à pas lents les compagnies disloquées. Tout mon cœur était avec lui. Je le vis donner ses ordres avec un calme parfait, comme s’il eût toute sa vie commandé sur le champ de bataille. Et déjà la force suprême des masses d’hommes — la confiance — raffermissait les rangs. Une sorte de mathématique pénétrait l’écheveau effrayant de la déroute. Notre fusillade redoubla ; les cavaliers commencèrent à hésiter.

En ce moment, mes brancardiers se remirent en marche, malgré mes ordres et mes supplications. Par bonheur, après une descente de quelques minutes, nous recommençâmes de monter :