Page:Rosny - Les Profondeurs de Kyamo, 1896.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

leurs positions, tandis que nos Moreau sont demeurés sous-lieutenants, au maximum capitaines… Personnellement, j’ai rencontré un homme de génie, un homme que je ne crains pas de comparer à Bonaparte, et si j’en ai rencontré un, pourquoi n’y en aurait-il pas eu dix ? Il se nommait Charles Rambert et servait sous mes ordres. Ce n’était pas un officier de profession. Il apprit le métier, pour ainsi dire, en se jouant, et montra de telles aptitudes, une telle ardeur, qu’en moins de trois semaines je lui confiais une lieutenance. Non seulement il se montra digne de mon choix, mais son habileté semblait s’accroître en raison même des difficultés. À cette époque, encore un peu souffrant d’une blessure, on m’avait chargé de la formation de recrues. J’avais toute liberté ; je pouvais employer mes hommes comme bon me semblait. J’eus donc l’occasion d’éprouver Rambert de toutes les façons, depuis de petites manœuvres d’éclaireurs jusqu’à des surprises nocturnes. Il se tira de tout avec un succès si extraordinaire, que ma confiance en lui fut bientôt partagée par tous mes officiers, sauf quelques jaloux. Quant aux troupes, il les avait fanatisées à la fois par son habileté à les commander et par ce je ne sais quoi qui fait