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rudiments d’organisation, système de défense forte et réfléchie, énergie vitale considérable.

Là vivait l’analogue de ce qu’avait été l’homme à l’époque tertiaire, un animal qui, pour des raisons mystérieuses, avait échoué où son émule avait réussi. Là vivait la genèse de l’humanité avant l’homme doué du verbe, un des plus émouvants, sinon le plus émouvant, des poèmes épiques arrivés, que puisse concevoir le cerveau des hommes.

Alglave résolut fortement qu’il pénétrerait dans Kyamo, qu’il assisterait à la vie de ces êtres, les verrait agir dans l’intimité de leurs refuges…

Cependant, le grand brasier s’allumait à l’orée du village. Sa lueur effaça celle de la lune et pâlit encore les étoiles.

Les nègres poussèrent des clameurs joyeuses d’enfants.

Dans la plaine, les bêtes, étonnées, se turent, puis reprirent leur clameur de chasse, de terreur et d’amour. La fumée dissipa les arômes exquis de la plante. Bientôt un buffle, des antilopes, furent mis à rôtir sur la flamme.

Alglave, pensif, sentit s’accroître plus forte, de minute en minute, sa résolution de pénétrer dans les profondeurs de Kyamo.