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Dans la voiture, Langre et Meyral s’entre-regardaient tout pâles :

— Est-ce la révolution ? fit le vieil homme.

— C’en est un épisode, murmura Meyral. Un même ordre a dû atteindre les faubourgs ; des centaines de mille hommes sont en marche.

Soudain le chant vacilla et se fragmenta ; une onde courut de tête en tête : la multitude ralentit sa course et des détonations retentirent, d’abord isolées, puis par salves incohérentes…

— Les flics ! Les flics ! Mort aux flics ! Assassins… Leur peau !

Une force arrivait, qui faisait refluer le peuple : avec des rugissements et des plaintes, il se disloquait, il se heurtait aux masses qui débouchaient par la rue de Vaugirard, la rue du Cherche-Midi, la rue de Sèvres ; les faces insanes, les yeux forcenés évoquaient les écumes et les phosphorescences de la mer.

À l’arrière, les agents formaient un radeau noir, compact et pesant, qui oscillait sans