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— Naoh a rompu les pattes de la tigresse…, il l’a rendue plus faible qu’une louve !

À l’approche du guerrier, elle se soulevait avec un rauquement de colère et de crainte. Il levait sa massue :

— Naoh peut tuer la tigresse, et la tigresse ne peut pas lever une seule de ses griffes contre Naoh !

Un bruit confus s’entendit. Naoh rampa dans l’herbe haute. Et des biches parurent, fuyant des chiens encore invisibles, dont on entendait l’aboiement. Elles bondirent dans l’eau, après avoir flairé l’odeur de la tigresse et de l’homme, mais le dard de Naoh siffla ; l’une des biches, atteinte au flanc, dériva. En quelques brasses, il l’atteignit. L’ayant achevée d’un coup de massue, il la chargea sur son épaule et l’emporta vers le refuge, au grand trot, car il flairait le péril proche… Comme il se glissait parmi les pierres, le Lion Géant sortit de la forêt.


VI

LA FUITE DANS LA NUIT


Six jours avaient passé depuis le combat des Nomades et de la tigresse. Les blessures de Gaw se cicatrisaient, mais le guerrier n’avait pu reprendre encore la force écoulée avec le sang. Pour Nam, s’il ne souffrait plus, une de ses jambes restait lourde. Naoh se rongeait d’impatience et d’inquiétude. Chaque nuit, le Lion Géant s’absentait davantage, car les bêtes connaissaient toujours mieux sa présence : elle imprégnait les pénombres de la forêt, elle rendait effrayants les bords de la rivière. Comme il était vorace et qu’il continuait à nourrir la tigresse, sa tâche était âpre : souvent tous deux endu-