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L’IMMOLATION

Mi-morte de terreur, elle fut droit à l’écurie, se terra près du cheval, sous la litière. Elle entendit bientôt le lourd pas, le souffle atroce de son père, et elle le voyait circuler, à travers la paille humide, tâter avec d’horribles mains soubresautantes, l’air farouche d’une mauvaise bête. Il repassa deux ou trois fois sans découvrir la misérable.

Mais à la fin une semelle la heurta, elle se sentit saisie, férocement, le cou dans de larges doigts, écrasée sur la litière, entre les pieds du cheval. Lamentable, joignant les mains, l’inoffensive fille cria :

— Père… père !… Pardon… Père !

Sa supplication s’étouffa sous les fortes serres. Puis, tandis qu’elle perdait le sens, étranglée, noire, avec un dernier geste de navrement, d’humble prière, il l’aplatit sur le dos, souleva ses pauvres jupes courtes, et la viola.