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pu entreprendre la prodigieuse révolution sociale qui s’accomplit dans leur pays. Il n’en résulte pas que les Japonais soient nécessairement supérieurs aux Chinois, leurs voisins. La théorie de l’équivalence virtuelle des races est encore loin d’être ébranlée par eux. L’école de Darwin, qui est celle où l’on compte le plus de partisans de la doctrine de l’inégalité ethnique, soutient seulement que l’être individuel ou collectif, une fois engagé dans une voie de développement, ne peut plus sortir de cette voie pour s’engager dans une autre ; elle ne déduit pas de là que toutes les voies ne sont pas équivalentes dans l’évolution générale de la nature.

La présence du sang blanc, parmi les éléments constitutifs de la nation japonaise, a été soupçonnée par plusieurs savants, entre autres par Quatrefages. Elle peut être tant bien que mal reconnue par divers ordres de procédés scientifiques. L’anthropologie est sans doute appelée à constater des différences physiques suffisantes pour séparer les Japonais des Chinois et des populations mongoliques de l’Asie centrale et méridionale ; mais jusqu’à présent ses patientes investigations n’ont abouti à aucun résultat plausible. La linguistique comparée marche à tâtons dans ce domaine peu connu de ses recherches ; elle nous signale quelques faits curieux, mais ces faits sont insuffisants. L’ethnographie, appuyée sur l’histoire, sur la critique des monuments de la littérature et de l’art, sur l’exégèse des livres religieux et mythiques, nous a apporté seule une argumentation solide en faveur d’une théorie qui, sans le secours de cette science, serait probablement demeurée longtemps encore à l’état de doctrine hypothétique.