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LA CONFÉDÉRATION DES TROIS CANTONS

Sur ce conseil, Stauffacher se rendit dans le pays d’Uri, où il vit Walter Furst et Arnold de Melchthal. Ces trois hommes s’entretinrent des malheurs de leur patrie et convinrent de la délivrer du pouvoir des baillis. Ils se réunissaient dans une prairie solitaire, le Grutli (Rutli), située au bord du lac des Quatre-Cantons, au pied du Seelisberg. Dans la nuit du 7 novembre 1307, une dernière assemblée eut lieu au Grutli. Chacun des trois conjurés avait amené dix hommes de confiance de son pays. Tous jurèrent de défendre la liberté, d’expulser les baillis et de tout sacrifier pour la délivrance de la patrie. L’exécution du complot fut fixée au 1er janvier 1308. Jusque-là, chacun devait garder un secret absolu sur les décisions prises.


Monument de Guillaume Tell à Lausanne.

Fig. 76. — Monument de Guillaume Tell à Lausanne.


Tellsplatte.

Fig. 77. — Tellsplatte.
16me LECTURE

Guillaume Tell. Expulsion des baillis. — Bientôt Gessler crut remarquer que le peuple relevait la tête et montrait plus de fierté. Il conçut des soupçons. Pour éprouver les Uranais, il fit planter sur la place publique d’Altorf une perche surmontée d’un chapeau aux couleurs de l’Autriche. Tous les passants devaient se découvrir devant ce chapeau et s’incliner en signe de soumission. Or, un jour, Guillaume Tell, un habile arbalétrier de Burglen, passe sans faire le salut exigé. Il est aussitôt saisi et conduit devant le bailli. « Je sais, lui dit celui-ci, que tu es un adroit tireur. En punition de ta désobéissance, je te condamne à abattre une pomme placée sur la tête de ton fils. » C’est en vain que Tell demande en grâce que cette cruelle épreuve lui soit épargnée. Gessler est inflexible. Il menace même Tell et son fils de les faire mettre à mort si ses ordres ne sont pas exécutés. Tell obéit en frémissant ; la flèche part et perce la pomme sans toucher l’enfant. Le peuple marque sa satisfaction par des cris de joie.

Mais Gessler s’est aperçu que Tell, avant de tirer, a caché une autre flèche sous ses habits. « Pourquoi cette seconde flèche, dit-il ? » Tell évite de répondre d’une manière positive. Gessler le presse de questions, l’assurant qu’il n’a rien à craindre pour sa vie. Tell alors répond hardiment : « Si la première flèche avait atteint mon fils, la seconde ne vous aurait pas manqué. » — « Il est vrai que je t’ai promis la vie sauve, réplique Gessler plus furieux que jamais, mais je vais t’enfermer en un lieu