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MOINES, BOURGEOIS ET CHEVALIERS

mand, Conrad Ier, qui visitait l’abbaye, fit répandre sur le sol de l’église, pendant une procession des Maître tenant à la main des verges.
Fig. 50. — Maître tenant à la main des verges.
(D’après un manuscrit du XIIIme siècle.)
élèves, une corbeille d’excellentes pommes ; mais aucun d’entre eux ne se laissa déranger et ne se baissa pour en ramasser. On dit aussi que le roi les fit venir vers lui et leur plaça à chacun une monnaie d’or dans la bouche. L’un d’eux la rejeta avec mépris. « Ah ! s’écria Conrad, celui-là fera un bon moine. » Charmé de sa visite, le roi accorda aux élèves trois jours de congé et fit des présents au couvent.

L’abbaye était très riche ; elle possédait de vastes domaines dans la Thurgovie, le pays de Zurich, l’Argovie et l’Alsace. Ses fermes, ses pâturages, ses forêts lui rapportaient des revenus qui ne firent qu’augmenter. Avec le temps, elle devint puissante, mais perdit de sa réputation comme centre d’études et de science.


13me LECTURE

Châteaux et églises au moyen âge. — Après les invasions germaniques en Helvétie, les solides constructions de pierre des Romains avaient fait place à des maisons beaucoup plus modestes et construites en bois. Même dans les villes, les maisons n’avaient qu’un étage. Les rues étaient mal

Château de Kibourg au XVIme siècle.

Fig. 51. — Château de Kibourg au XVIme siècle.


pavées, pleines de flaques ; en dehors du quartier commerçant, les vaches et les porcs se promenaient Chevalier revêtu de la cotte de mailles.
Fig. 52. — Chevalier revêtu de la cotte de mailles.
librement. Les maisons n’avaient rien d’élégant ; les chambres étaient basses et étroites et le jour n’y pénétrait que par de petites fenêtres aux carreaux de toile ou de papier huilé. Les lits étaient un luxe ; pour dormir, les bourgeois se contentaient d’une peau de mouton ou d’une paillasse placée directement sur le plancher. C’est à partir du treizième siècle que l’on se mit à construire en pierre les maisons d’habitation et que ces demeures devinrent plus spacieuses et plus commodes.

Au chevalier, les maisons ordinaires ne suffisent pas ; il vit pour la guerre et a d’autres besoins que le paysan et le bourgeois. Pour se défendre, il revêt une longue tunique de mailles de fer et couvre sa tête d’un casque d’acier ; il est armé d’une lance et d’une épée et pare les coups au moyen d’un bouclier. Sa demeure est fortifiée ; dans les premiers temps, c’est principalement une forte tour en bois, établie sur la hauteur et protégée par un fossé et un talus. Puis la construction prend plus d’importance. La pierre y remplace le bois. La tour principale, nommée le donjon, est réservée au seigneur ; c’est là qu’il habite avec sa famille, là qu’il met en lieu sûr son trésor, là aussi que se trouve la grande salle dite salle des chevaliers ou des gardes, où il reçoit ses vassaux et ses invités. D’autres bâtiments servent de logements aux serviteurs du seigneur et à ses soldats ou sont réservés pour les cuisines, les écuries, les greniers, etc. Ces constructions sont protégées par une épaisse muraille d’enceinte, garnie de tours et entourée de fossés profonds ou de précipices. L’ensemble forme une forteresse facile à défendre, à laquelle