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RECHERCHES SUR

radoucir en faveur de Y Ode à la colonne ; un libre penseur intraitable arguait que, malgré de louables efforts pour s’affranchir ensuite, il était resté toute sa vie le chantre puéril et réactionnaire des Vierges de Verdun (1) ; un républicain radical refusait même de tenir pour remarquable un homme qui avait mis tant d’années à venir jusqu’à la République. — « Laissez faire le temps ! » s’écriait un vieux savant, tout blanc, tout rose, qui, élevé à l’École normale au temps où Nisard y professait, vous exposait, avec les clignements d’yeux péremptoires d’un homme sûr de son fait, que toute cette poésie n’était qu’un vain travail de rhétorique, une décoration faite d’oripeaux que le vent déchirerait ou un feu d’artifice dont la pluie aurait bientôt raison. Quelques amateurs., d’âges moins mûrs, adhéraient énergiquement à ces paroles, se ressouvenant tout à coup des leçons qui leur avaient été faites au collège pendant l’Empire, alors que les professeurs n’osaient parler d’Hugo sans les plus sévères censures et ne leur donnaient à apprendre que des morceaux choisis tirés de Casimir Delavigne ou de Ponsard. Des hommes de science, ennemis nés des choses

(1) Cela a été dit textuellement au Conseil municipal de Paris, par un conseiller qui fut depuis député.