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A ces principes qui, depuis trente années, ont été, on le voit, intégralement conservés, s’associe une pratique qui, elle aussi, a subi très peu de modifications, mais sur laquelle il importe néanmoins d’insister, puisque, plus encore que les théories, elle sera attaquée par la Révolution.

Le peintre d’histoire, qui cherche un sujet de tableau, interroge l’histoire grecque, Homère, Tite-Live ou, simplement, le Dictionnaire de la Fable et, sans se préoccuper de savoir si l’épisode qu’il va traiter est illustre ou inconnu, il lui demande d’abord de se prêter à une traduction plastique. L’intérêt dramatique devrait être écarté parce qu’il détourne l’esprit de la contemplation pure et simple des formes, et l’on se souvient des reproches dont David accablait la scène du Dèlur/e de Girodet(l). Cependant, celte proscription n’a jamais été absolue, car les Sabines ou Léonidas n’y auraient pas échappé et, d’ailleurs, vers le temps qui nous occupe, les artistes et les critiques commencent à se montrer favorables à des sujets plus animés. Nous verrons, aux Salons de 1817 et de 1819, des écrivains orthodoxes, comme Landon, encourager les tableaux dramatiques. 11 suffira que l’artiste ait subordonné l’intérêt de l’action au souci de la plastique pour éviter tout reproche.

Le sujet choisi peut être équivoque ou voluptueux (2). Le plus souvent, il n’a aucune signification morale précise (3). Pourtant, qu’un sujet ait une portée de morale privée et surtout de morale civique, alors le peintre sera félicité pour avoir répondu à toutes les exigences de l’Ecole (4).

Quand il arrête la composition de son œuvre, l’artiste ne se préoccupe ni de l’intérêt dramatique ni de la composition lumineuse. Immobiles ou dans un mouvement ralenti qui simule l’immobilité, les personnages s’ordonnent par un rythme géométrique et le tableau prend le caractère d’un bas-relief. Les groupements symétriques, aux masses pondérées, divisent la composition et lui donnent une régularité solennelle.

Les héros se relient les uns aux antres et expriment leurs pensées par des gestes, et à ces gestes, qui doivent être mesurés, harmonieux et significatifs, b’ peintre accorde une importance exagérée.

il eût reconnu qu’il représentait plutôt des habillements, des costumes et des ustensiles que des mœurs : il eût reconnu que ses tableaux u’élaienl pas des productions d un art noble et libéral. » Paillot de Montaberl, Traité de la peinture, vm, p. 292.

(1) J. David, Le Peintre David, ix, p. 503.

(2) David, Mar set Vénus (musée de Bruxelles} ; — P. Franque, Jupiter et Junon (musée de Montauban), Girodet, Py g malion ; — Guérin, Anacréon (musée de Dijon) ; — Lancrcnon, Le Fleuve Scamandre (musée d’Amiens), etc.

(3) Par exemple : David, Les Stibines (musée du Louvre) ; — Granger, Homère et les Chiens de Glaucus (musée de Dijon), etc.

(i) David, Le Serment des Horaces, La Mort de Socrate, Léonidas, etc. ; — Girodet, Hippocrate repoussant les présents rl’Artaæerxés ; — Lelbière, Supplice des fils de Brutus, etc.