Page:Rosenthal - Carpaccio, Laurens.djvu/88

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
84
VITTORE CARPACCIO.

retrouve l’avantage pour la sainte, insignifiante chez son rival et, chez lui, belle d’héroïsme et de résignation. Ainsi, à comparer les d’œuvres de Carpaccio et de Memlinc on les pénètre davantage et l’on goûte mieux l’émotion intime de deux âmes.

Le cycle de sainte Ursule est la plus connue et la seule populaire des œuvres de Carpaccio, et cette popularité se justifie par la place réelle qu’il occupe dans l’ensemhle de sa production. Mais, il convient aussi de l’ajouter, l’artiste a bénéficié des circonstances les plus favorables. S’il eût peint à Florence, on pourrait lui opposer mainte entreprise semblable à la sienne. La Toscane, au xve siècle, a fourni à ses peintres de multiples occasions de développer leur pensée sur des champs aussi ou plus importants. Les parois énormes de l’abside de Santa Maria Novella se sont offertes à Ghirlandajo ; Prato a reçu Filippo Lippi ; San Gimigniano, le Campo Santo de Pise, la chapelle du palais Riccardi ont occupé tour à tour, sans l’épuiser, l’activité de Benozzo Gozzoli ; Rome a été hospitalière aux Florentins et Ghirlandajo comme Botticelli ont travaillé à la Sixtine. Fra Angelico dans les appartements du Vatican. Pinturicchio y décorait les appartements des Borgia, il allait entreprendre à la libreria de Sienne la biographie d’Eneas-Sylvius Piccolomini, dans ces années mêmes où Carpaccio élaborait la vie de sainte Ursule. Bien près de Venise, Padoue, qui avait accueilli jadis Giotto et Altichieri,