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VITTORE CARPACCIO.

reconnaît l’év[eque vénitien François Arzentin, l’ambassadeur Nicolas Michel et le cardinal Grimani.

Leur physionomie est fouillée avec acuité : il ne serait point besoin du costume pour montrer à quel rang, à quelle race appartiennent ces grands seigneurs. Tantôt les visages ont une musculature accentuée, la barbe mal faite souligne les rides et les plis caractéristiques des joues : les cheveux, tombant sur les sourcils en frange épaisse, font paraître les fronts bas ; les yeux noirs, parfois enfoncés, décèlent par leur expression l’habileté des intelligences en travail : tantôt une chevelure blonde et mousseuse entoure un visage juvénile : les traits sont purs, reposés ; l’œil clair n’a qu’une demi-expression. Conseillers, lecteurs, assistants ont, suivant leurs dignités et la mode, les cheveux longs, demi-longs ou les têtes rases. Ils ne portent la barbe que par exception, et cette particularité minime donne cependant un aspect tout différent à l’ensemble des personnages en scène.

Si la douce Ursule, sa mère et ses suivantes ont moins de souplesse dans l’expression, elles gardent des lignes harmonieuses sous la somptuosité d’une parure aux complications passagères. Carpaccio n’ignore aucun des raffinements de la mode, il en suit les variations avec une verve incomparable. On sent qu’il dispense dans ces descriptions une sorte de ravissement naïf.

Sainte Ursule se présente à nous dans une robe droite d’un beau vert changeant sur laquelle est jetée en biais une large draperie rouge ; une longue chaîne descend de