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VITTORE CARPACCIO.
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Cette vaste entreprise, Carpaccio la poursuivie sans défaillance, sans fatigue ; son talent s’y est fortifié, affermi, et le neuvième épisode, qu’il peignit en premier, est le seul qui offre de la faiblesse. Jamais sa verve ne l’abandonne, et si trois fois le même sujet s’offre à lui presque sans variantes, s’il s’agit de peindre trois audiences solennelles, il trouve de merveilleuses ressources pour en renouveler l’intérêt. C’est que la réalité le soutient. Les groupements, l’ambiance, le cadre peuvent varier à l’infini.

Ces personnages qui s’avancent d’une démarche ample, le geste si aisé, ceux qui les reçoivent avec une gravité si naturelle et les privilégiés qui ont été conviés aux cérémonies sont des portraits des plus notoires contemporains de Carpaccio : l’érudition a parfois retrouvé leurs noms.

Dans cette galerie, les Lorédan tiennent une place prépondérante. Bienfaiteurs et protecteurs vigilants de la Scuola, c est grâce à leurs libéralités que celle-ci put commander à Carpaccio l’histoire de sainte Ursule. Aussi le peintre a-t-il orné ses tableaux de leurs armoiries, et une inscription sur une banderole rappelle leur générosité. Ils apparaissent mêlés aux différentes scènes et, dans la Pala, les trois filles de Pierre Lorédan sont glorifiées parmi les onze mille vierges. Avec une intention délicate, la première femme de Nicolas Lorédan, Eugénie, morte à cette époque, est associés à ces hommages. Elle assiste agenouillée aux funérailles de sainte Ursule. Ailleurs, près du pape Cyriaque dont les trails rappellent ceux d’Alexandre VI, on