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VITTORE CARPACCIO.

C’est un oratoire quadrangulaire de dimensions médiocres. Sous un beau plafond sculpté, les toiles de Carpaccio sont encastrées dans de vieilles boiseries, elles forment autour de trois des parois une frise continue. Ambrées et noircies par le temps, elles reçoivent une lumière si parcimonieuse que l’on ne les voit distinctement qu’à certaines heures et qu’il faut, pour les analyser, se servir de réflecteurs ou prier le sacristain de maintenir la porte d’entrée ouverte. Cette incertitude même est un charme et l’on se plairait à croire que la Vie de saint Georges, Saint Tryphon, le Christ au Jardin des Oliviers, la Vocation de saint Mathieu, la Vie de saint Jérôme ont été composés pour cet apaisement et ce silence, mais l’érudition impitoyable nous apprend qu’ils y furent simplement transportés au milieu du xvie siècle et l’on se félicite qu’ils se soient associés d’une façon si intime à leur cadre d’adoption.

La réplique de Saint Georges combattant se voit à Saint-Georges Majeur, dans la froideur d’une salle officielle aux murs vides.

Pitoyable fleur d’herbier, quel parfait contraste lui fournissent le palais Cappello Layard et Capo d’Istria : ces deux résurrections précieuses. Sur le Canal Grande, le seuil du Palazzo appelle le regard par son portique fleuri. Il semble, lorsque l’aimable vouloir des hôtes en a accordé l’accès, que ces fleurs célèbrent l’éternelle beauté d’un passé encore vivant. Pièces vastes, sièges de cuir, verreries, faïences, tapis et meubles riches, le soin intelligent d’un