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VITTORE CARPACCIO.

V

Le temps et les hasards ont été cléments à Carpaccio, dont les œuvres maîtresses sont, pour la plupart, demeurées sous la protection de saint Marc ; beaux hymnes à la gloire de Venise qui n’ont pas été éloignés du lieu qui les inspira.

Lorsqu’une visite à l’Académie a mené de la salle des Primitifs à celle où la Présentation de la Vierge de Titien lutte d’harmonie contre les fanfares d’un triptyque de Jacobello del Fiore, on gravit quelques marches et, soudain, tout est apaisement : une lumière douce baigne la pièce octogone aux murailles de laquelle chante en symphonie délicate la Sainte Ursule de Carpaccio. Avant que de fixer son admiration, l’œil s’enchante du spectacle ainsi présenté. C’est la plénitude de l’impression donnée à l’observateur amoureux. Les toiles sont encastrées aux murs avec exactitude, les dimensions de la salle laissent à l’œuvre toute son ampleur et l’isolement y mêle un charme intime tel que l’eût désiré le peintre du Songe de la Sainte.

En d’autres salles sont éparses encore des œuvres de Carpaccio, mais rien n’en vient rehausser l’accent.

Le musée Correr garde avec les dentelles, les parchemins, les armes et les damas glorieux, le tableau célèbre des Courtisanes. Tout auprès des reliques de cette vie disparue, et alors que l’œil peut embrasser la fuite