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VITTORE CARPACCIO.
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luxe qui signe l’œuvre, bien plus que la figure du saint et que le geste lourd des moines qui s’enfuient dans toutes les directions. Comme dans la scène de massacre de saint Ursule Carpaccio traduit avec maladresse un mouvement violent.

Le Tableau des funérailles est fort gâté. Les fabriques et les fonds sont à demi effacés ; il est difficile de juger de la vivacité du pinceau de l’artiste et des effets de lumière que l’on devine encore, il reste une ordonnance un peu froide et sèche, une belle étude de cadavre rigide et majestueux.

Ces deux épisodes conservent, même après analyse, quelque chose de décevant ; il a été nécessaire d’en défendre l’authenticité (au reste inattaquable). Le troisième est une œuvre de toute beauté.

Saint Jérôme dans son oratoire a inspiré maint artiste ; Albert Dürer en 1514, quelques années après Carpaccio, en a tracé une image célèbre où il a exalté la paix et le recueillement de l’étude, le silence et le confort d’une chambre de travail. Mais ce que Dürer n’a pas dit, ce que seul un italien pouvait sentir, c’est l’alliance étroite entre la passion de l’étude et celle de la beauté.

Quand nous essayons de nous représenter le cabinet d’un Politien ou d’un Pic de la Mirandole, nous n’imaginons rien qui surpasse ce studio de saint Jérôme, véritable apothéose de l’esprit de la Renaissance.

La vaste pièce, d’une architecture noble, toute baignée de clarté, les meubles, les objets familiers dont aucun ne se contente d’être utile mais que tous portent la marque