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XXIX

De vos yeux, le mirouer du Ciel et de Nature,
La retraite d’Amour, la forge de ses dards.
D’où coule une douceur, que versent vos regards
Au cœur, quand un rayon y survient d’aventure,

Je tire pour ma vie une douce pasture.
Une joye, un plaisir, que les plus grands Césars,
Au milieu du triomphe, entre un camp de soudars,
Ne sentirent jamais : mais courte elle me dure.

Je la sens distiller goutte à goutte en mon cœur,
Pure saincte parfaicte angelique liqueur,
Qui m’eschaufe le sang d’une chaleur extrême.

Mon ame la reçoit avecque tel plaisir,
Que tout esvanouy je n’ay pas le loisir
Ny de gouster mon bien, ny penser à moymesme.