Page:Ronsard - Sonnets pour Hélène - 1921.djvu/174

Cette page n’a pas encore été corrigée

XLVII

Lettre, de mon ardeur véritable interprète,
Qui parles sans parler les passions du cœur,
Poste des amoureux, va conter ma langueur
A ma Dame et comment sa cruauté me traite.
 
Comme une messagère et accorte et secrette
Contemple en la voyant sa face et sa couleur,
Si elle devient gave, ou palle de douleur,
Ou d’un petit souspir si elle me regrette.

Fais office de langue : aussi bien je ne puis
Devant elle parler, tant vergongneux je suis.
Tant je crains l’offenser, et fault que le visage

Blesme de ma douleur en rende tesmoignage.
Tu pourras en trois mots luy dire mes ennuis :
Le silence parlant vaut un mauvais langage.