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XLV

Ha ! que je suis marry que la mort nous desrobe
Celuy qui le premier me fist voir ton attrait :
Je le vy de si loin, que la poincte du trait
Demeura sans entrer dans les plis de ma robe.
 
Mais ayant de plus près entendu ta parole,
Et veu ton œil ardent, qui de moy m’a distrait,
Au cœur tomba la flèche avecque ton portrait,
Mais plustost le portrait de ce Dieu qui m’affole.

Esblouy de ta veue, où l’Amour fait son ny,
Claire comme un Soleil en flames infiny.
Je n’osois t’aborder, craignant de plus ne vivre.
 
Je fu trois mois rétif : mais l’Archer qui me vit,
Si bien à coups de traits ma crainte poursuint,
Que battu de son arc m’a forcé de te suivre.