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XIX

Bon jour ma douce vie, autant remply de joye,
Que triste je vous dis au départir adieu :
En vostre bonne grâce, hé dites-moy quel lieu
Tient mon cœur, que captif devers vous je r’envoye :

Ou bien si la longueur du temps et de la voye
Et l’absence des lieux ont amorty le feu
Qui commençoit en vous à se monstrer un peu :
Au moins s’il n’est ainsi, trompé je le pensoye.
 
Par espreuve je sens que les amoureux traits
Blessent plus fort de loin qu’à l’heure qu’ils sont près,
Et que l’absence engendre au double le servage.

Je suis content de vivre en l’estât où je suis.
De passer plus avant je ne dois ny ne puis :
Je deviendrois tout fol, où je veux estre sage.