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par un monstre marin. Ce qu’ils firent, se voians réduis a extrémité: & choisissoient les pucelles par sort. Avint, que le sort tomba sur une fille a Laomedon nommée Hesione. Parquoy ils la prindrent, & l’atacherent toute nue a un rocher près du rivage, auquel ils avoient coutume de lier les autres. Ainsi qu’elle étoit la, n’atendant sinon que le monstre vint pour la devorer, Hercule passant la auprès, & entendant comme elle se lamentoit, émeu a pitié, non seulement la delivra, mais aussi mit a mort le monstre. Laomedon lui offrit pour recompense trente chevaus, que Juppiter lui avoit donnés. Hercule, qui alloit au voiage de la toison d’or, le remercia pour l’heure, & lui dist, qu’il les prendroit a son retour. Quand il revint pour les reprendre, Laomedon les lui refusa: dequoi Hercule étant courroussé, mist a sac la ville de Troie. La fable est en partie dans Valere Flacque au second des Argonautiques, en partie dans Homere au cinquième de l’Iliade. Le Poete dit qu’il a peur que les yeus de sa dame tienent de la race de Laomedon, c’est a dire, qu’ils soient trompeurs.


Ces deus yeus bruns, deus flambeaus de ma vie,
Dessus les miens foudroians leur clarté,
Ont esclavé ma jeune liberté,
Pour la damner en prison asservie.

De vos dous feus ma raison fut ravie,
Si qu'ébloüi de vôtre grand beauté,
Opiniastre à garder loiauté
Autres yeus voir depuis je n'eus envie.

D'autre éperon mon Tyran ne me point,
Autres pensers en moi ne couvent point,