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Tant de formis, animaus qui ont peur
Qu’en leur vieilleſſe ils n’endurent souffrance,
Comme l’on voit d’hommes par noſtre France
Se remuer : ſoit quand Bellone anime
La maieſté de leur cœur magnanime,
Ou quand la paix à ſon rang retournée,
Chacun renuoie exercer ſa iournée.
Bien que la perle & les pierres exquiſes,
En nostre mer des marchans ne soient quiſes,
Ne par noz prez, on ne voie amaßée
L’herbe d’Heleine, ou bien la Panacée,
Ni le dous miel ne suinte en nos rameaus
Ni le dous laist ne coule en nos ruiſſeaus :
Des fiers lions la ſemence ſuperbe
En eſt bien loin & le ſerpent par l’herbe,
Tel qu’en l’Affrique, horrible n’espouante
Le ſeur paſteur: ne l’amour vehemente
Qui s’enfle au front du poulain, n’i est pas
Mixtionnée es amoureux apas.
Nos chams Iaſon, de ſes taureaus ardans
Ne laboura, pour y ietter dedans
D’un grand serpent les machoires terribles :
Ne la moisson de tant de gens horribles,
Hors de la terre a force deſſerrés
S’eſt heriẞée en corſelets ferrés.
Mais au contraire, ilz enfantent vn blé,
Nous le rendant d’uſure redoublé :
Et dont iamais la premiere apparance,
Du laboureur n’a trompé l’eſperance.
Plus qu’en nul lieu dame Ceres la blonde