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Et dedans ses cheveus choysissoient leur demeure.

J’en ai tel souvenir que je voudrois qu’à l’heure
(Pour jamais n’y penser) son œil m’eust fait rocher.


Douce, belle, gentille, & bien fleurente Rose,

Que tu es à bon droit à Venus consacrée,
Ta delicate odeur hommes & dieux recrée,
Et bref, Rose, tu es belle sur toute chose.
La Grace pour son chef un chapellet compose
De ta feuille, & tousjours sa gorge en est parée,
Et mille fois le jour la gaye Cytherée
De ton eau, pour son fard, sa belle joue arose.
He Dieu, que je suis aise alors que je te voi
Esclorre au point du jour sur l’espine à requoy,
Dedans quelque jardin pres d’un bois solitere !
De toi les Nymphes ont les coudes & le sein :
De toi l’Aurore emprunte & sa joüe, & sa main,
Et son teint celle-là qui d’Amour est la mere.


Sonet en dialogue.

r. Que dis-tu, que fais-tu, pensive tourterelle
Desus cest arbre sec ? t. Helas je me lamente.
r. Et pourquoi, di-le moi ? t. De ma compagne absente,
Plus chere que ma vie. r. En quelle part est-elle ?
r. Un cruel oyselleur par glueuse cautelle
La prise, & l’a tuée : & nuit & jour je chante
Son trespas dans ces bois, nommant la mort méchante