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DE P. DE RONSARD.

Si ton bon heur tu sçavois bien entendre,
D'ainsi coucher au giron de Cassandre,
Et de dormir en ses bras amoureus.
   Mais, las! je vy chetif et langoreus,
Pour sçavoir trop mes miseres comprendre:
Las! pour vouloir en ma jeunesse aprendre
Trop de sçavoir, je me fis malheureus.
   Mon Dieu, que n'ai-je au chef l’entendement
Aussi plombé qu'un qui journelement
Béche en la vigne ou fagotte au bocage!
   Je ne serois chetif comme je suis,
Le trop d'esprit ne me seroit domage,
Et ne pourrois comprendre mes ennuis.

Sonetz en vers heroiques


   D'une belle Marie en une autre Marie,
Belleau, je suis tombé, et si dire ne puis
De laquelle des deux plus l'amour je poursuis,
Car j'en aime bien l'une, et l'autre est bien m’amie.
   On dit qu'une amitié qui se depart demie
Ne dure pas long tems, et n'aporte qu’ennuis,
Mais ce n'est qu'un abus: car tant ferme je suis
Que, pour en aimer une, une autre je n’oublie.
   Tousjours une amitié plus est enracinée,
Plus long tems elle dure, et plus est ostinée