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Pourquoi fais-tu ce qui ne se peut faire ?
Pourquoi romps-tu si faussement ta foi ?



XXXVI.


En ma douleur, malheureux, je me plais,
Soit quand la nuit les feux du ciel augmente,
Ou quand Faurore en jonche[1] d’amaranthe
Le jour mêlé d’un long fleurage épais ;

D’un joyeux deuil mon esprit je repals,
Et quelque part où seulet je m’absente,
Devant mes yeux je vois toujours présente
Celle qui cause et ma guerre et ma paix.

Pour l’aimer trop également j’endure
Or' un plaisir, or' une peine dure,
Qui d’ordre égal[2] viennent mon cœur saisir :

Bref, d’un tel miel mon absinthe est si pleine,
Qu’autant me plaît le plaisir que la peine,
La peine autant cooime fait le plaisir.


  1. Enjonche : jonche.
  2. Par une succession régulière.


XXXVII.


Or' que Jupin, époint[1] de sa semence
Sent de l’amour les traits accoutumés,
Et que le chaud de ses reins allumés
L’humide sein de Junon ensemence :

Or' que la mer, or' que la véhémence
Des vents fait place aux grands vaisseaux armés,

  1. Époint : aiguillonné, excité