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Plus grand honneur au monde, que me voir,
En te baisant, dans ton sein rendre l’âme.

Celui dont Mars la poitrine renflamme,
Aille à la guerre ; et d’ans et de pouvoir
Tout furieux, s’ébatte à recevoir
En sa poitrine une espagnole lame :

Moi plus couard, je ne requiers sinon,
Après cent ans sans gloire et sans renom,
Mourir oisif en ton giron, Cassandre[* 1].

Car je me trompe, ou c’est plus de bonheur
D’ainsi mourir, que d’avoir tout l’honneur
D’un grand César, ou d’un foudre Alexandre.


  1. Properce et Tibulle forment souvent le même souhait.



XVIII[* 1].


Je meurs, Paschal[1], quand je la vois si belle
Le front si beau, et la bouche et les yeux,
Yeux le logis d’amour victorieux
Qui m’a blessé d’une flèche nouvelle.

Je n’ai ni sang, ni veine, ni moelle,
Qui ne se change : et me semble qu’aux cieux
Je suis ravi, assis entre les dieux,
Quand le bonheur me conduit auprès d’elle.

Ah ! que ne suis-je en ce monde un grand roi !

  1. Paschal du Faux ami et admirateur de Ronsard. C’était un habile généalogiste. Nous retrouvons son nom dans les vers du poète.
  1. Il appert par ce sonnet et plusieurs autres, qu’ils ne sont pas tous faits pour Cassandre, mais pour d’autres qu’il a aimées. ( Muret.)