XIV.
Dedans un pré je vis une naïade,
Qui comme fleur marchait dessus les fleurs,
Et mignottait[1] un bouquet de couleurs,
Échevelée, en simple verdugade[2].
De son regard ma raison fut malade,
Mon front pensif, mes yeux chargés de pleurs,
Mon cœur transi : tel amas de douleurs
En ma franchise[3] imprima son œillade.
Là je sentis dedans mes yeux couler
Un doux venin, subtil à se mêler
Où l’âme sent une douleur extrême.
Pour ma santé je n’ai point immolé
Bœufs ni brebis, mais je me suis brûlé
Au feu d’amour, victime de moi-même.
XV
Ciel, air et vents, plains et monts découverts,
Tertres vineux[1] et forêts verdoyantes.
Rivages torts[2] et sources ondoyantes ;
Taillis rasés, et vous bocages verts.
Antres moussus à demi-front ouverts,
Prés, boutons, fleurs et herbes roussoyantes[3],