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PRÉFACE DE LA FRANCIADE.

Descriptas servare vices, operumque colores, Cur ego , si nequeo ignoroque , poeta salutor? Cur nescire, pudens prave, quant discere malo?.. Res gesta regunique ducumque, et tristia bella, Quo scribi possint numero monstravit Homerus. (HoR., Epist. ad Pis.,74-88.)

Homère, de science et de nom illustré , Et le romain Virgile assez nous ont montré Comment et par quel art, et par quelle pratique Il fallait composer un ouvrage héroïque, De quelle forte haleine et de quel ton de vers , Varié d’arguments et d’accidents divers. J'ai suivi leur patron : à genoux, Franciade; Adore lÉnéide adore lIliade ; Révère les portraits et les suis d’aussi loin Qu’ils m’ont passé d'esprit , d'artifice et de soin. Miracle non étrange à celui qui contemple Ces deux grands demi-dieux , dignes chacun d’un temple. L’un Romain, l’autre Grec, à qui les cieux amis Et les Muses avaient tout dit et tout permis, Et non à moi Français, dont la langue peu riche, Couverte de halliers, tous les jours se défriche, Sans mots , sans ornements, sans honneur et sans prix , Comme un champ qui fait peur aux plus gentils esprits