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DE P. DE RONSARD.

servés lui auraient assuré un rang fort honorable parmi les prosateurs.

En présence de tant de titres à la gloire, on ne peut soupçonner la surprise ou l’usurpation. Les œuvres de Ronsard étaient lues et admirées dans les parties de l’Europe les plus éloignées, jusqu’en Moravie, jusqu’en Pologne. Sans parler des rois, reines, princes et princesses qui l’honoraient de leur amitié et cultivaient son commerce, conversant parfois avec lui dans la langue des Muses, il triompha du vice de l’envie, trop commun dans la république des lettres. Les poëtes les plus distingués le saluaient comme leur maître, et gravitaient en satellites autour de ce soleil de la poésie. Nous parlons sans figure, puisqu’il avait, à l’imitation des Alexandrins, créé une nouvelle Pléïade, dont le nom, comme celui de la première, a pris sa place dans l’histoire de la littérature. Elle se composait de du Bellay, Belleau, Jodelle, Baïf, Dorat et Pontus de Thiard, évêque de Chalon. Aux hymnes de louanges que ces poëtes chantaient en l’honneur de Ronsard, se mêlaient les voix de l’Hospital, de Jacques de Thou, de Garnier, de Jamyn, de Passerat, de P. de Brach[1], de Pasquier, de Bertaut, de Rapin, de Robert Estienne, de Turnèbe, de Pithou… « Enfin, depuis son âge de vingt ans jusques à sa mort, il n’y a presque point eu d’orateur, ni de poëte, d’historien, ni de théologien même, qui dans leurs divers écrits n’aient toujours avantageusement parlé de ce grand homme, et il a joui de son vivant de la plus haute et de la plus éclatante gloire que jamais homme de lettres ait

  1. Voir l’ingénieuse Notice sur P. de Brach, par M. Reinhold Dezeimeris. Dans la monographie de l’élève, le jeune et savant auteur a parfaitement apprécié le talent du maître.