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DE P. DE RONSARD.

Les Sonnets pour Hélène marquèrent en quelque sorte la fin de cette grande carrière poétique. Le digne objet de ses chants était cette fois une jeune fille d’honneur de la reine, d’une très-noble maison de Saintonge, et que Catherine de Médicis avait elle-même désignée à l’adoration du poëte. Ranimant pour la fiction cette ardeur qu’un véritable amour avait échauffée dans ses jeunes années, il termina presque sa vie en louant les beautés et les rares qualités de sa maîtresse, à laquelle il consacra même dans le Vendômois une fontaine appelée de son vivant et après lui la Fontaine d’Hélène.

Honoré des libéralités de Charles IX, Ronsard n’hésitait point à les solliciter, et nous trouvons souvent dans ses poésies des plaintes ou des appels à la générosité que nous croirions aujourd’hui peu convenables à la dignité de l’écrivain, mais que les mœurs des courtisans justifient aux yeux de l’historien. Le roi lui donna donc l’abbaye de Bellozane et quelques prieurés ; Ronsard prend même souvent le titre d’aumônier ordinaire de Sa Majesté Charles IX. Il ne fut pas moins estimé du roi Henri III ; mais, la vieillesse et la maladie l’empêchant de faire sa cour, il n’a plus avec Henri cette « familière privauté » qui ne se peut entretenir que par une « hantise ordinaire. » Toutefois il ne laissait pas d’être présent à la pensée du roi, et sa gloire ne perdait rien de son éclat dans les pays étrangers, puisque la reine Élisabeth lui envoya un diamant d’une grande valeur, auquel elle comparait ses ouvrages, et que la belle reine d’Écosse, dont il chanta la jeunesse, la beauté, les malheurs, lui fit présent en l’année 1583 d’un buffet de deux mille écus, qu’elle lui envoya par le sieur de Nauzon, un de ses secrétaires. Au-dessus était un

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