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DE P. DE RONSARD.

dité, qui lui continua jusqu’à la mort, le détermina à renoncer à tous les avantages que lui avait offerts la cour et la faveur du roi, dont il était devenu le compagnon familier, pour s’élever au-dessus du commun par la gloire des lettres. Colletet, dans la vie qu’il nous a laissée de P. de Ronsard, ne fait pas difficulté d’attribuer en partie ce nouveau dessein à l’amour dont il fut alors épris pour une belle jeune fille nommée Cassandre, qu’il voulut immortaliser dans ses écrits, comme Properce avait fait Délie, Tibulle Cinthie, et le grand Pétrarque sa Laure. Quoiqu’il n’eût jamais cessé d’étudier les poëtes latins « jusque-là qu’il avait appris Virgile entièrement par cœur, » et que toujours, même étant page, il eût montré son goût pour les poëtes français, ayant à la main ou le Roman de la Rose ou les œuvres de Clément Marot, il crut ne pas pouvoir voler de ses propres ailes, sans revenir à la connaissance des langues anciennes, qu’il se repentait d’avoir négligées dans ses premières études ; aussi manifesta-t-il à son père le désir de se remettre aux lettres. Celui-ci ne se prêta qu’à contre-cœur à ce nouveau dessein de se placer sous la férule d’un précepteur, à l’âge de vingt ans, et défendit expressément à son fils de s’adonner au métier des Muses. Mais, ayant perdu son père le 6 juin 1544, Ronsard, maître absolu de ses actions, vint se ranger sous la discipline de l’illustre Jean Daurat, qui, recueilli chez le seigneur Lazare de Baïf, enseignait les lettres grecques à Jean-Antoine de Baïf, son fils, devenu dès lors l’ami et plus tard l’émule du nouveau disciple. Lorsque Daurat obtint la principalité du collége de Coqueret[1], les deux

  1. Le collége de Cocqueret, situé dans la basse cour du collége de Reims. Il ne reste plus aujourd’hui que le bâtiment sans aucun vestige d’établissement littéraire. (Crevier, Hist de l’Univ. de Paris.)