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DE P. DE RONSARD.

Deux sont morts au berceau, aux trois vivans en rien
Semblable je ne suis ny de mœurs, ny de bien.
Si tost que j’eus neuf ans au collége[1] on me meine ;
Je mis tant seulement un demi an de peine
D’apprendre les leçons du régent de Vailly ;
Puis, sans rien profiter, du collége sailly,
Je vins en Avignon……

(Élégie à Remy Belleau.)

Ce peu de goût pour les études trompa l’espérance du père de Ronsard, qui rêvait pour son fils les charges de la justice ou les dignités de l’Église. Il résolut alors de le vouer à la carrière des armes, dans laquelle sa beauté, sa bonne façon et sa merveilleuse adresse lui promettaient de rapides et grands succès. « Ceux qui l’ont cogneu en sa première fleur racontent que jamais la nature n’avoit formé un corps mieux composé ny proportionné que le sien, tant pour l’air et les traicts du visage, qu’il avoit très-agréable, que pour sa taille et sa stature extrêmement auguste et martiale. » (Du Perron, Or. fun. de Ronsard, 1586.)

Le roi rassemblait alors à Avignon une armée contre Charles-Quint ; Ronsard vint y trouver son père, qui le donna pour page à François, fils aîné du roi. Le jeune prince étant mort à Tournon trois jours après, Ronsard passa au service de Charles, duc d’Orléans, qui le donna lui-même à Jacques VI de Stuart, roi d’Écosse, venu en France pour épouser Magdelaine, fille du roi François Ier.

Après je fus mené
Suyvant le roi d’Escosse, en l’Escossoise terre,
Où je fus trente moys et six en Angleterre.

(Élégie à Remy Belleau.)
  1. Au collége royal de Navarre où il se lia d’amitié avec Charles, depuis cardinal de Lorraine.
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