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SUPPLÉMENT

   C’est toi qui les soucis, et les gennes mordantes,
Et tout le soin enclos en nos âmes ardantes
         Par ton présent arraches.
C’est toi qui rens la vie ans vergiers qui languissent,
Aus jardins la rousée, et aus cieus qui noircissent
         Les idoles attaches.

   Mai, si te plaist déesse une fin à ma peine.
Et donte sous mes braz celle qui est tant pleine
         De menasses cruelles,
Affin que de ses yeus (yeus qui captif me tiennent)
Les trop ardens flambeaus plus brûler ne me viennent
         Le fond de mes mouelles.

A SON LIVRE.

[1550 : Livre III, 12.]

[Texte de 1572 : Livre V, xxxii.]

   Bien qu’en toy mon livre on n’oie
Achille es plaines de Troie
Brandir l’homicide dard,
Et qu’un Hector n’y foudroie
L’estomach d’un Grec soudard.

   Ne laisse pourtant de mettre
Tes vers au jour, car le métré
Qu’en toy bruire tu entens.
T’ose pour jamais promettre
Te faire vainqueur du temps.

   Si la gloire et la lumière
De Smyme luist la première,
L’honneur sur tous emportant,
Une muette fumiere
N’obscurcist Thebes pourtant.

   Les vers qu’il m’a pieu de dire
Sur les langues de ma Lyre
Vivront, et supérieurs
Du temps, on les voira lire
Des hommes postérieurs.