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Que courroucée de la playe.
Du soc, qui l’estomac luy fend.
Si tost que tu es arrosée

Au poinct du jour, de la rosée.
Tu fais en l’air mille discours :
En l’air des ailes tu frétilles,
Et pendue au ciel tu babilles,
Et contes aux vents tes amours.

Puis du ciel tu le laisses fondre
Sur un sillon verd, soit pour pondre,
Soit pour esclorre, ou pour couver.
Soit pour apporter la bêchée
A tes petits, ou d’une achée.
Ou d’une chenille, ou d’un ver.

Lors moy couché dessus l’herbette
D’une part j’oy ta chansonnette :
De l’autre, sus du poliot,
A l’abry de quelque fougère
J’escoute la jeune bergère
Qui desgoise son lerelot.

Lors je dy, tu es bien-heureuse
Gentille Alouette amoureuse,
Qui n’as peur ny soucy de riens.
Qui jamais au cœur n’as sentie
Les desdains d’une fîere amie,
Ny le soin d’amasser des biens :

Ou si quelque soucy te touche.
C’est, lors que le Soleil se couche,
De dormir, et de resveiller
De tes chansons avec l’Aurore
Et bergers et passans encore,
Pour les envoyer travailler.

Mais je vis tousjours en tristesse
Pour les fiertez d’une maistresse
Qui paye ma foy de travaux.
Et d’une plaisante mensonge.
Mensonge, qui tousjours allonge

La longue trame de mes maux.