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III. LIVRE DES ODES

De mes baisers tant bien donnez,
Vous trouverez la rose née,
Et les œillets environnez
De fleurettes ensanglantées
D’Hyacinthe, et d’Ajax, plantées
Pres des liz sur sa bouche nez.
   Les marjolaines y fleurissent,
L’amôme y est continuel,
Et les lauriers qui ne périssent
Pour l’Hyver, tant soit il cruel :
L’anis, le chévrefueil qui porte
La manne qui vous reconforte,
Y verdoye perpetuel.
   Mais je vous pri’ gardez- vous bien.
Gardez-vous qu’on ne l’eguillonne.
Vous apprendriez bien tost combien
Sa poincture est trop plus félonne :
Et de ses fleurs ne vous soûlez
Sans m’en garder, si ne voulez
Que mon ame ne m’abandonne.


A UN ROSSIGNOL.

ODE XXIII.

Chantre Rossignol passager.
Qui t’es encor venu loger
Dedans ceste fresche ramée
Sur ton espine accoustumée,
Et qui nuict et jour de ta vois
Assourdis les monts et les bois,
Redoublant la vieille querelle
De Terée, et de Philomele :
Je te supplie (ainsi tousjours
Puisses jouyr de tes amours)
De dire à ma douce inhumaine.
Au soir quand elle se promeine
Icy pour ton nie espier.
Que jamais ne faut se fier