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II. LIVRE DES ODES
A CASSANDRE.
ODE XVIII.

Ma petite colombelle,
Ma petite toute belle,
Mon petit œil baisez moy :
D’une bouche toute pleine
D’amours, chassez-moy la peine
De mon amoureux esmoy.
Quand je vous diray mignonne.
Approchez vous, qu’on me donne
Neuf baisers tout à la fois.
Donnez-m’en seulement trois.
Tels que Diane guerrière
Les donne à Phœbus son frère.
Et l’Aurore à son vieillard :
Puis reculez vostre bouche.
Et bien loin toute farouche
Fuyez d’un pied fretillard.
Comme un toreau par la prée
Court après son amourée,
Ainsi tout plein de courrons
Je courray fol après vous :
Et prise, d’une main forte
Vous tiendray de telle sorte
Qu’un aigle un pigeon tremblant :
Lors faisant de la modeste.
De me redonner la reste
Des baisers ferez semblant.
Mais en vain serez pendante
Toute à mon col, attendante
(Tenant un peu l’œil baissé)
Pardon de m’avoir laissé.
Car en lieu de six, adonques
J’en demanderay plus qu’onques
Tout le ciel d’estoilles n’eut.
Plus que d’arène poussée