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II. LIVRE DES ODES

Et qui me desroba le cœur
Pour m’honorer d’une langueur.
Te voyant des belles la belle,
Tu me suces l’ame et le sang :
Monstre moy ta rose nouvelle,
Je dy, mignarde, ton sein blanc.
Et tes deux rondelets tétons
Qui s’enflent comme deux boutons.
Las ! puis que ta beauté meurtrière
Ne me daigne faire mercy.
Et que de jour en jour plus fiere
Tu prens plaisir de mon soucy,
Aumoins regarde sur mon iront
Les maux que tes beaux yeux me font.

A LA FONTAINE BELLERIE.

ODE IX.

  O Fontaine Bellerie,
Belle fontaine cherie
De noz Nymphes, quand ton eau
Les cache au creux de ta source
Fuyantes le Satyreau,
Qui les pourchasse à la course
Jusqu’au bord de ton ruisseau,
  Tu es la Nymphe eternelle
De ma terre paternelle :
Pource en ce pré verdelet
Voy ton Poëte qui t’orne
D’un petit chevreau de laict,
A qui l’une et l’autre corne
Sortent du front nouvelet.
  L’Esté je dors ou repose
Sus ton herbe, où je compose,
Caché sous tes saules vers,
Je ne sçay quoy, qui ta gloire
Envoira par l’univers,
Commandant à la Mémoire