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Adieu ma chere vie, adieu ma seconde ame,
Adieu mon cher soucy, par qui seul je souspire :
Adieu le bel objet de mon plaisant martire,
Adieu bel œil divin qui m’englace et m’enflame,
Adieu ma douce glace, adieu ma douce flame,
Adieu par qui je vis et par qui je respire :
Adieu belle, humble, honneste, et gentille maistresse,
Adieu les doux liens où vous m’avez tenu
Maintenant en travail, maintenant en liesse :
Il est temps de partir, le jour en est venu :
Le besoin seulement, non le desir me presse.
Mais avant je vous prie et vous conjure en lieu
De moy, prendre mon cœur, tenez, je le vous laisse :
Gardez-le, baisez moy, maistresse, et puis adieu.


BELLEAU

Comment au departir.) Estant pressé de faire quelque long voyage, il dit adieu à sa maistresse, certes assez amoureusement, l’appellant sa vie, son ame, son soucy, son objet, son œil, sa glace, son feu, n’oubliant rien de toutes mignardises, desquelles il sçait fort bien s’accoustrer quand il veut. En fin la baise, et luy fait present de son cœur.

L’Autheur appelle Madrigals les Sonets qui ont plus de quatorze lignes, comme cestuicy qui en a seize. XXXVIII


Quand je vous voy ma gentille maistresse,
Je deviens fol, sourd, muet, et sans ame :