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Mais helas ! Rossignol, ou bien à mes chansons, (Si quelque amour te point) accorde tes dous sons, Ou laisse moy tout seul pleurer en ce bocage.


BELLEAU

Si tost qu’entre les bois.) L’Autheur oyant un Rossi gnol desgoiser dedans un bocage, le prie, que s’il est espoinçonné de quelque passion amoureuse, qu’il accorde sa voix à la sienne, ou bien qu’il le laisse seulet au bois sans l’ennuyer davantage. Il fait une gentille compa raison de sa vie à celle du Rossignol, accommodant la rosée du ciel aux larmes de ses yeux, le mignard desgoisement à ses tristes chansons. Toutefois il se dit diffe rent d’un poinct, d’autant que le Rossignol n’a que trois mois de l’an pour lamenter, et luy a l’année entiere pour pleurer ses douleurs. Le commencement de ce Sonet est fait à l’imitation d’une Ode d’Anacreon de la Cigalle.

XXXVII


Belle, gentille, honneste, humble, et douce Marie,
Qui mon cœur en voz yeux prisonnier detenez,
Et qui sans contredit à vostre gré menez
De vostre blanche main les brides de ma vie .
Quantes fois en l’esprit sens-je naistre une envie
De rompre voz liens par monceaux trançonnez ?
Mais mon ame s’en rit, que vous emprisonnez,
Et qui mourroit de dueil sans vous estre asservie.
Ha je vous aime tant, que je suis fol pour vous.
J’ay perdu ma raison, et ma langue debile
Au milieu des propos vous nomme à tous les coups