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Qui fais sortir tout ce qui vit, au jour,
Comme du Tout le germe et la racine :
Idalienne, Amathonte, Eyrcine,
Garde du ciel Cypre ton beau sejour :
Baise ton Mars, et tes bras à l’entour
De son col plie, et serre sa poitrine.
Ne permets point qu’un barbare Seigneur
Perde ton isle et souille ton honneur :
De ton berceau chasse autre-part la guerre.
Tu le feras • car d’un trait de tes yeux
Tu peux flechir les hommes et les Dieux,
Le Ciel, la Mer, les Enfers et la Terre.


LIX

Je faisois ces Sonets en l’antre Pieride,
Quand on vit les François sous les armes suer,
Quand on vit tout le peuple en fureur se ruer,
Quand Belonne sanglante alloit devant pour guide :
Quand en lieu de la Loy le vice, l’homicide,
L’impudence, le meurtre, et se sçavoir muer
En Glauque et en Prothée, et l’Estat remuer,
Estoient tiltres d’honneur, nouvelle Thebaïde.
Pour tromper les soucis d’un temps si vicieux,
J’escrivois en ces vers ma complainte inutille.
Mars aussi bien qu’Amour de larmes est joyeux.
L’autre guerre est cruelle, et la mienne est gentille :
La mienne finiroit par un combat de deux,
Et l’autre ne pourroit par un camp de cent mille.