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Jeunesse l’alaicta, le sang chaut le nourrit,
Cuider l’ensorcela, paresse le pourrit,
Tout enflé de desseins, de vents et de fumées.
Cassandre me ravit, Marie me tint pris :
Ja grison à la Cour d’une autre je m’espris.
Si elles m’ont aimé, je les ay bien aimées.


LV

Doux cheveux, doux present de ma douce Maistresse,
Doux liens qui liez ma douce liberté,
Doux filets où je suis doucement arresté,
Qui pourriez adoucir d’un Scythe la rudesse :
Cheveux, vous ressemblez à ceux de la Princesse,
Qui eurent pour leur grace un Astre merité :
Cheveux dignes d’un Temple et d’immortalité,
Et d’estre consacrez à Venus la Déesse.
Je ne cesse, cheveux, pour mon mal appaiser,
De vous voir et toucher, baiser et rebaiser,
Vous perfumer de musc, d’ambre gris et de bâme,
Et de voz nœuds crespez tout le col m’enserrer,
Afin que prisonnier je vous puisse asseurer
Que les liens du col sont les liens de l’ame.


LVI

Je vous donne des œufs. L’œuf en sa forme ronde
Semble au Ciel, qui peut tout en ses bras enfermer,
Le feu, l’air et la terre, et l’humeur de la mer,
Et sans estre comprins comprend tout en ce monde.
La taye semble à l’air, et la glere feconde
Semble à la mer qui fait toutes choses germer :