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Ceux qui font autrement, ils font un mauvais tour
A la simple Venus, et à son fils Amour.
S’il advient quelque jour que d’une voix hardie
J’anime l’eschafaut par une tragedie
Sentencieuse et grave, alors je feray voir
Combien peuvent les nerfs de mon petit sçavoir.
Et si quelque furie en mes vers je rencontre,
Hardy j’opposeray mes Muses alencontre :
Et feray resonner d’un haut et grave son
(Pour avoir part au bouc) la tragique tançon.
Mais ores que d’Amour les passions je pousse,
Humble je veux user d’une Muse plus douce.
Non, non, ’je ne veux pas que pour ce livre icy
J’entre dans une escolle, ou qu’un regent aussy
Me lise pour parade : il suffit si m’amie
Le touche de la main dont elle tient ma vie.
Car je suis satisfait, si elle prend à gré
Ce labeur que je vouë à ses pieds consacré,
Et à celles qui sont de nature amiables,
Et qui jusqu’à la mort ne sont point variables.


BELLEAU

Mon fils.) L’Autheur, apres avoir longuement chanté sa Cassandre, voyant son service n’estre recompensé que de rigueurs et de cruautez, sans espoir d’autre meil leur traitement, delibera, suyvant les remedes de Lucrece et d’Ovide, prendre la medecine propre et particuliere pour se purger de ce mal, qui est de s’absenter de la personne aimée, et par là se donner occasion d’en perdre du tout le souvenir. Or estant jeune, dispos, et desireux de son ancienne liberté, arriva en Anjou, voulant mettre fin à son malheur, et esteindre (comme il feit) une vieille et trop ingrate amitié, pour jamais ne s’empestrer es r