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Il faut vendre son bien, il faut faire presens
De chaisnes, de carquans, de diamans luisans :
Il faut donner la Perle, et l’habit magnifique,
Il faut entretenir la table, et la musique,
Il faut prendre querelle, il faut les supporter :
Certes j’aimerois mieux dessus le dos porter
La hotte, pour curer les estables d’Augée,
Que me voir serviteur d’une dame rusée.
» La mer est bien à craindre, aussi est bien le feu,
» Et le Ciel quand il est de tonnerres esmeu.
» Mais trop plus est à craindre une femme clergesse,
» Sçavante en l’art d’amour, quand elle est tromperesse :
» Par mille inventions mille maux elle fait,
» Et d’autantqu’elleestfemme,etd’autantqu’ellesçait.
Quiconque fut le Dieu, qui la meit en lumiere,
Il fut premier autheur d’une grande misere.
Il falloit par presens consacrez aux autels
Acheter noz enfans des grands Dieux immortels,
Et non user sa vie avec ce mal aimable,
Les femmes, passion de l’homme miserable,
Miserable et chetif, d’autant qu’il est vassal,
Durant le temps qu’il vit, d’un si fier animal.
Mais je vous pri’, voyez comme par fines ruses
Elles sçavent trouver mille feintes excuses,
Apres qu’ell’ ont failly ! voyez Helene apres
Qu’Ilion fut bruslé de la flame des Grecs,
Comme elle amadoua d’une douce blandice
Son badin de mary, qui pardonna son vice,
Et qui plus que devant de ses yeux fut espris,
Qui scintilloient encor les amours de Paris.
Que dirons nous d’Ulysse ? encores qu’une trope
De jeunes poursuyvans aimassent Penélope,