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Depuis ce jour mon cœur qui s’alluma,
D’aller au Ciel sottement presuma,
En imitant des Geans le courage.
Cesse mon cœur, la force te defaut :
Bellerophon te devrait faire sage :
Pour un mortel le voyage est trop haut.

III

Belle Erigome, Icarienne race,
Qui luis au Ciel, et qui viens en la terre
Faire à mon cœur une si douce guerre,
De ma raison ayant gaigné la place :
Je suis veincu, que veux-tu que je face
Sinon prier cest Archer qui m’enferre,
Que doucement mon lien il desserre,
Trouvant un jour pitié devant ta face ?
Puis que ma nef au danger du naufrage
Pend amoureuse au milieu de l’orage,
De mast, de voile assez mal accoustrée,
Vueilles du Ciel en ma faveur reluire :
Il appartient aux Astres, mon Astrée,
Luire, sauver, fortuner et conduire.

MADRIGAL I

L’homme est bien sot, qui aime sans cognoistre.
J’aime, et jamais je ne vy ce que j’aime :
D’un faux penser je me deçoy moy-mesme,
Je suis esclave, et ne cognois mon maistre.