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Voyant la mer, de pleurs se consomment,
Et son Thésée en vain elle nommoit :
L’autre soit gay, comme il est bien croyable
Que l’eut jadis Pénélope louable,
Quand elle vit son mary retourné,
Ayant vingt ans loing d’elle séjourné.
Apres fay luy sa rondelette oreille
Petite, unie, entre blanche et vermeille,
Qui sous le voile apparaisse à l’égal
Que fait un lis enclos dans un crystal,
Ou tout ainsi qu’apparoist une rose
Tout fraischement dedans un verre enclose.
Mais pour néant tu aurois fait si beau
Tout l’ornement de ton riche tableau,
Si tu n’avois de la lineature
De son beau nez bien portrait la peinture.
Pein le moy donc gresle, long, aquilin,
Poly, traitis, où l’envieux malin
Quand il voudroit n’y sçauroit que reprendre,
Tant proprement tu le feras descendre
Parmy la face, ainsi comme descend
Dans une plaine un petit mont qui pend.
Apres au vif pein moy sa belle joue
Pareille au teint de la rose qui noue
Dessus du laict, ou au teint blanchissant
Du lis qui baise un œillet rougissant.
Dans le milieu portrais une fossette,
Fossette, non, mais d’amour la cachette,
D’où ce garçon de sa petite main
Lasche cent traits, et jamais un en vain,
Que par les yeux droit au cœur il ne touche.
Helas ! Janet, pour bien peindre sa bouche,