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DES ODES.

D'vne eau bourbeuſe bien auant
Puiſée au fleuue de triſteſſe.
Que veux-tu plus ? dy, que veux-tu ?
Ne m'as-tu pas aſſes batu ?
Veux-tu qu'en ceſt âge ie meure !
Me veux-tu bruſler foudroyer,
Et tellement me poudroyer
Qu'vn ſeul oſſet ne me demeure ?
Ie ſuis appreſté ſi tu veux,
De te ſacrifier cent bœufs
A fin de deſenfler ton ire:
Ou ſi tu veux auec les Dieux
Ie t'enuoyray là haut aux Cieux
Par le ſon menteur de ma Lyre.
Les freres d'Helene faſchez
Pour les Iambes delaſchez
Contre leur ſœur par Steſichore,
A la fin luy ont pardonné,
Et pleins de pitié redonné
L'vſage de la veuë encore.
Tu peux helas (Deniſe) außi
Rompre la teſte à mon ſouci,
Te flechiſſant par ma priere:
Rechantes tes vers & les traits
De ma face en cire portraits
Iette au vent trois fois par derriere.
L'ardeur du courroux que lon ſent
Au premier âge adoleſcent,
Me fiſt trop nicement t'eſcrire:
Maintenant humble & repentant,
D'œil non feint ie vay lamentant
La iuſte fureur de ton ire.

I ij