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DES ODES.

Se va ſeoir aupres du throne
De ſon frere ſon eſpoux:
Comme toy Iunon de France,
Graue en royale apparance
Fends la tourbe des François,
T'allant ſeoir à la min deſtre
De ton eſpoux noſtre maiſtre,
Le meilleur de tous les Rois:
Duquel apres mainte année
Tu conceus par deſtinée
(Les cieux à tes vœus ouuers)
Des fils heritiers du monde,
Qui d'vne race feconde
Peupleront cet Vniuers.
Or comme Alcide differe
De proüeſſes à ſon frere,
Conceu par trois nuicts de temps,
L'aiſné prendra dauantage
Que ſes puiſnez de courage
Qui mit à naiſtre ſept ans.
Tout außi toſt que Lucine
Euſt fortuné ta geſine,
Et que l'enfant nouueau-né
De ſa douce voix premiere
Euſt ſalué la lumiere
Du iour à chacun donné,
Tu n'as pas comme fiſt Rhée,
A la pierre deuorée
Le corps de ton fils changé,
De peur que ne le perdiſſes,
Et le perdant ne le viſſes
Par vn Saturne mangé.